Togo : temoignage d’une jeune fille abandonnée à 7 ans et devenue travailleuse domestique

Abina 21 ans, a perdu son père très tôt. Cette jeune fille n’a jamais eu la chance d’aller à l’école et a été abandonnée par sa mère à l’âge de sept ans. Elle a été élevée par sa grand-mère à Bissaka, un village de la préfecture de Bassar (nord du Togo), avant de partir pour le Nigeria sur proposition d’une entremetteuse. « Fatiguée des travaux champêtres une dame m’a proposé de m’amener au Nigeria, pour aller vivre avec son enfant et j’ai accepté », déclare Abina. 

Dans les milieux ruraux, bon nombre d’enfants arrêtent les études par manque de moyens des parents pour le travail de « domestique » ou personnel de maison à Lomé ou dans les capitales de la sous-région. Dans la majorité des cas, ces enfants une fois arrivée dans le pays d’accueil sont placés dans des ménages et deviennent la personne à tout faire. Seul l’entremetteur (se), les parents et l’employeur maîtrisent les clauses du contrat de travail.  

Chez sa patronne au Nigeria Abira devrait se lever très tôt le matin pour faire le ménage, la lessive, apprêter et accompagner l’enfant de cette dernière à l’école. «A la fin du mois, la femme qui m’a amené au Nigeria vient percevoir mon salaire. Elle m’a jamais remis un seul franc », dénonce la jeune fille.

Grondée, insultée, battue, et frappée par sa patronne, elle a été ramenée un jour dans son village natal sur demande de son oncle paternel. Abina pensait être au bout de ses peines. Très furieux que sa nièce rentre du Nigeria sans sous, son oncle décida qu’elle reparte travailler au Ghana. « Cinq mois après, une dame, m’informa que ma grand-mère était malade et se trouvait dans un état critique donc je devais envoyer de l’argent pour ses soins. Mais c’était faux, mon oncle avait menti », raconte Abina.  

Dès lors, elle a décidé d’épargner son salaire de domestique pour s’acheter des pagnes et des ustensiles de cuisine. «A mon retour du Ghana, mon oncle, était très remonté contre moi du fait qu’au lieu de lui ramener de l’argent, je suis arrivée avec des pagnes et des ustensiles de cuisine», affirme-t-elle.

Comme Abina, ils sont nombreux, dans le monde, ces enfants obligés de travailler pour assurer leur survie. Pourtant, depuis 1919, la communauté internationale s’engageait à protéger les enfants de l’exploitation laborieuse. Depuis, le travail infantile est régie par plusieurs autres grands textes juridiques internationaux. En 2015, la mise en place des Objectifs de Développement Durables s’emparent également de cet enjeu. L’objectif 8,7 qui vise la fin de tout travail infantile d’ici 2025 est particulièrement important. 

Les objectifs 5 (protection de l’exploitation économique des jeunes filles) ou 16 (lutte contre les abus, violences et exploitation des enfants) sont aussi des lignes directrices au cœur de l’engagement des acteurs de la protection de l’enfance et de la promotion des droits humains.

 Malgré les garanties juridiques largement adoptées par les pays, les résultats sont loin d’être satisfaisants. On note depuis 2000 une évolution à la baisse du nombre d’enfants de 5 à 17 ans contraints de travailler. Mais, en 2019, l’UNICEF fait état de 168 millions d’enfants concernés.

Aujourd’hui, trop âgée pour débuter les études, Abina se forme en métier de coiffure. Elle compte ouvrir son propre atelier à la fin de la formation, vivre de son métier et s’occuper de ses futurs enfants. «Le travail domestique n’est pas un sot métier, mais il faut avoir au moins le certificat d’étude du premier cycle et négocier toi-même ton contrat », conseille la jeune fille. 

Photo: illustration.

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