Togo : l’automédication chez les enfants : manque de moyens, ignorance ou habitude ?

L’automédication chez les enfants est une pratique très récurrente dans la société togolaise. Et rare sont les parents qui ont recours à un médecin, plus précisément à un pédiatre quand, leur enfant récent des malaises. Près de dix millions d’enfants de moins de cinq ans sont morts en 2007, selon l’UNICEF et plus de la moitié de ces décès sont provoqués par des maladies que l’on pourrait traiter avec des médicaments essentiels pédiatriques.

« Quand mon enfant a de la fièvre, je lui donne des produits tels que l’efferalgan ou du paracétamol. Quelque temps après si la fièvre ne descend pas, je lui fais la purge et je lui passe une pommade mentholée sur le corps », affirme Reine, commerçante, la quarantaine, mère de trois enfants en bas âge. Tout comme Reine, c’est des réactions qui surgissent dans les échanges avec les parents.

Se prononçant sur la question, sur la radio Djena, Togbé Agbetiafa Ebenezer, Pédiatre togolais et directeur préfectoral de la santé, a déclaré que les enfants sont amenés à l’hôpital souvent dans un état critique ou parfois ils décèdent. Comme Reine, Rafiatou Sédoh ne consulte un médecin qu’après-avoir tout essayé à la maison. « Nous avons beaucoup appris de nos grands-parents. Pour une simple fièvre, je fais boire à mes enfants des infusions de plantes. Quand la situation ne s’améliore pas, peut-être que l’enfant est anémié et il y a aussi des tisanes pour ça », dit-elle. Avant d’ajouter : « Quand j’essaie toutes ces choses et que ça ne marche pas, je les amène alors à l’hôpital peut être avec les machines ou les analyses, le médecin peut le guérir ».

Manque de moyens financier, ignorance ou négligence sont autant de raisons qu’affichent les parents qui continuent de s’adonner à cette pratique parfois suicidaire. Même les parents instruits et ayant un emploi décent ne dérogent pas à la règle. «Aujourd’hui si mes enfants vont régulièrement en consultation chez les médecins, c’est grâce à l’assurance. Je me souviens que mon fils avait eu des infections oculaires communément appelées « Apollo », ma femme et moi avons essayé de régler le problème avec l’eau de la mer et certaines plantes. C’est après une semaine de traitement à la maison que nous avons décidé de consulter un ophtalmologue et mon garçon a été guéri. Mais nous avons dépensé environ 100 000 Fcfa, une facture salée pour un fonctionnaire de catégorieA2 », relate Doh Komlan, enseignant dans un lycée public de Lomé. 

Abbey Dzidzoè, Secrétaire de Direction, n’a pas eu la même chance que l’enseignant. En 2015, elle a perdu sa fille de 8 ans à cause de la varicelle.  Une perte qu’elle aurait pu éviter si elle avait amené son enfant un peu plus tôt  dans un centre hospitalier. «Elle avait le corps fiévreux et manquait d’appétit le premier jour. Ensuite les boutons ont commencé par apparaitre   sur son corps et mes tantes m’ont conseillé d’aller acheter des feuilles qui selon leur expérience étaient le seul remède à ce mal. Ce que j’ai fait; mais au cinquième jour, ma fille a fait une crise et est rentrée dans le coma. C’est à ce moment que j’ai décidé de l’amener à l’hôpital mais c’était trop tard. Elle n’a pas pu être sauvée», raconte la maman éplorée, les larmes aux yeux.

Bien que d’autres parents aient vécu des situations similaires à celle de Mme Abbey, les enfants continuent d’être soignés à la maison. «Mes parents m’avaient soigné à la maison. J’en avais fait de même à mes enfants, ils ont grandit et sont toujours en bonne santé. Je ne vois pas pourquoi je ne le ferai pas à mes petits enfants. Mais, mes enfants s’y opposent farouchement. Ils préfèrent aller à l’hôpital. Moi je ne fais pas confiance à la médecine occidentale, tu dépenses beaucoup et tu ne sais même pas de quoi est constitué leur produit», se désole, Adjo Agbozo, la quatre-vingtaine et grand-mère de 18 petits-fils.

«L’automédication chez les enfants est tout aussi dangereuse que chez les adultes », alertent souvent les médecins. Alors chers parents et tuteurs, changez vos habitudes et prenez de bonnes décisions pour le bien des enfants.

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