Dr Isselmou BOUKHARY : « le Concours Miabe Djena entre dans la philosophie de la Convention Internationale des droits de l’enfant »

Le 30 juin 2018, la finale du concours national « Miabé Djena » organisé par le site d’information djena.info s’est tenue à Lomé (Togo). L’évènement a donné la parole aux enfants, les premiers acteurs en matière de leurs droits. Sur plus de 200 œuvres envoyées par les enfants des cinq régions économiques du Togo, 12 ont été retenues par le jury pour la finale remportée par Espoir Montcho dans la catégorie Poème et Farida ZAKARI dans la catégorie chant. Le concours « Miabe Djena » a été organisé avec l’appui technique et financier de l’UNICEF TOGO. Dr Isselmou BOUKHARY, Représentant Résident de l’UNICEF au Togo se prononce sur l’initiative.

Dr BOUKHARY, bonjour, votre organisation était le partenaire Officiel du concours Miabe Djena lancé à l’occasion de l’enfant africain observée le 16 juin, pourquoi avez-vous accepté de soutenir cette initiative ?

Nous avons accompagné cette initiative parce qu’elle entre dans notre vision globale qui concerne la participation des enfants dans la prise de décision sur leurs droits. Nous pensons que les enfants sont des acteurs de développement, des vecteurs de changement, et il est important que l’on fasse entendre leur voix sur l’atteinte des ODD. L’UNICEF encourage tous les gouvernements et les autres parties prenantes aux ODD à élargir les possibilités de participation des enfants dans les 17 ODD, car elles les touchent également. Et il faudrait que les enfants interpellent les acteurs (Gouvernants, Organisations, Leaders Communautaires) et qu’ils donnent aussi leurs points de vue sur cette question. Nous sommes donc heureux qu’il y ait eu cette participation et qu’il y ait eu des idées et des projets intéressants qui montrent qu’il existe des talents au Togo. Ces enfants sont aussi des citoyens de demain, ils seront les parents de demain. Et donc bâtir leur développement, c’est aussi bâtir et investir pour le développement du Togo de demain.

Une telle initiative entre -t-elle dans le cadre de votre engagement pour la protection des droits de l’enfant ?

Vous savez qu’à l’UNICEF nous somme guidés par la Convention internationale des droits de l’enfant à laquelle la plupart des pays du monde ont adhéré et qui a été ratifiée aussi par le Togo. Cette convention donne aux enfants des droits qui sont inaliénables et globaux. Ces droits concernent à la fois leur santé, leur éducation, leur accès à la justice, le droit à une identité et aussi le droit à la participation. Ce concours entre dans cette vision-là. Nous pensons qu’il est important que cet aspect de participation des enfants soit pris en compte dans les prises de décision. Dans notre programme actuel d’indicateurs 2014-2018, nous somme dans la dernière année, nous avons essayé d’œuvrer à ce que tous les enfants du Togo quel que soit leur sexe, origine et appartenance puissent bénéficier de leurs droits. C’est la base de la philosophie de la Convention Internationale des droits de l’enfant (CDE).

Que fait concrètement l’UNICEF au Togo dans le cadre de la protection de l’enfant?

Les actions que l’UNICEF mène sur le terrain dans le domaine de la protection des droits de l’enfant s’inscrivent dans le cadre du programme conjoint de coopération que l’UNICEF a avec le Gouvernement du Togo. L’objectif général du programme pays est de catalyser, dans une vision intégrée et globale de l’enfant, les actions pour réduire les disparités, notamment celles liées au genre, et de faire avancer le droit à la survie, au développement, à la protection et à la participation des enfants, tout en renforçant la résilience de leur famille. Le programme couvre l’ensemble du territoire national, l’accent étant mis sur les zones les plus défavorisées.

À travers sa composante Protection de l’Enfant et Autonomisation des adolescent(e) s, l’UNICEF a contribué à l’élaboration du Plan National de Développement (PND) et a appuyé la mise en œuvre de la SCAPE en renforçant la résilience des familles vulnérables, en consolidant les systèmes de protection des filles et des garçons contre la violence et en œuvrant pour la promotion de comportements positifs pouvant réduire les facteurs de vulnérabilité des enfants et des adolescent(e) s.

L’UNICEF s’est également investi dans le renforcement du système national de protection de l’enfance. Nous encourageons cependant une réforme du système qui reconnaît plus le rôle fort des familles et des communautés dans la prévention et la prise en charge des cas de maltraitance des enfants en lieu et place des centres d’accueil et des orphelinats qui ne répondent pas aux normes de base en matière d’accueil de cette tranche vulnérable.
Je n’oublie pas le développement de plans d’action communautaires de lutte contre les pratiques préjudiciables aux enfants dans le cadre de la mise en œuvre de la déclaration de Notsé et de son engagement additionnel sur le mariage des enfants.
Nous travaillons également avec d’autres partenaires au développement à l’instar de la Délégation de l’Union européenne avec qui nous co-finançons le projet « Amélioration de l’Accès à la justice pour les enfants au Togo ». Ce projet vise de façon spécifique à appuyer le renforcement d’un système de justice spécialisé et protecteur pour tous les mineurs en contact avec la loi. Grâce à ce projet, nous pensons toucher environ 3 600 enfants en contact avec la loi dont 900 enfants en conflit avec la loi et 2700 enfants victimes.

D’après vos études, quelle est la situation des droits de l’enfant au Togo ?

La situation des droits de l’enfant a connu des progrès importants. Au cours des cinq dernières années, nous avons eu des améliorations globales telles que la réduction de la mortalité infantile qui est passée de 124 ‰ à 88 ‰. Le taux de croissance économique est resté stable autour de 5 %. La pauvreté monétaire a globalement diminué de 58,7 % à 55,1 % entre 2011 et 2015. Nous avons eu des améliorations au niveau de l’éducation où plus de 90 % des enfants du Togo vont à l’école. Le taux net de scolarisation primaire est passé de 83,9 % en 2011 à 93,8 % en 2017.
Nous avons aussi des progrès au niveau de l’enregistrement des naissances qui est de l’ordre de 76 %, mais il reste encore beaucoup de défis à relever. Bien qu’au niveau national la mortalité infanto-juvénile ait baissé, elle demeure élevée, avec des disparités importantes entre le milieu rural (106 ‰) et le milieu urbain (69 ‰). 60,4 % des enfants vivent toujours dans des familles touchées par la pauvreté et 84,2 % des enfants âgés de 0 à 17 ans souffrent d’au moins une privation dans les différents domaines de leur bien-être (nutrition, santé, eau, assainissement, logement…) surtout en milieu rural.
Les défis les plus importants sont liés à l’opérationnalisation de la réforme du système de protection de l’enfant, à savoir : l’insuffisance des ressources financières, matérielles et humaines, la faiblesse du système de collecte et gestion des données, la faible capacité de coordination des interventions et l’implication encore faible des communautés.

Les leçons apprises du programme qui s’achève montrent l’importance de renforcer la collaboration avec les communautés et la programmation intégrée avec les autres donateurs, afin de mitiger les barrières dans l’accès et l’utilisation des services sociaux de base et de protection sociale en milieu rural. Et c’est ce que nous comptons faire au cours du futur programme conjoint de 2019-2023.

Les zones d’intervention seront définies en concertation avec le gouvernement en tenant compte des indicateurs de base, de l’accessibilité des zones d’intervention, des capacités d’aller à l’échelle pour l’équité des interventions, de la nécessité de consolider des acquis pour assurer la pérennisation et la durabilité des interventions.

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